Un dé­part à la re­trai­te sans mau­vai­ses surprises

Dans nos es­prits, voi­ci com­ment se dé­roule un dé­part à la re­trai­te bien mé­ri­té: le bud­get des pro­chai­nes an­nées est éta­b­li, la Har­ley-Da­vid­son ou le cam­ping-car est ache­té et l’établissement ain­si que les lo­caux sont li­qui­dés. Et voi­ci qu’arrive un cour­ri­er re­com­man­dé de l’administration fis­ca­le avec une fac­tu­re sa­lée. Com­ment est-ce possible?

En­vi­ron 17% des per­son­nes ac­ti­ves dans l’hôtellerie-restauration di­ri­gent leur pro­pre éta­blis­se­ment. D’un point de vue fis­cal, el­les sont donc con­sidé­rées com­me des in­dé­pen­dants qui pos­sè­dent une en­t­re­pri­se in­di­vi­du­el­le. Et beau­coup d’entre el­les pos­sè­dent aus­si un bien im­mo­bi­lier com­mer­cial. C’est pré­cis­é­ment ce der­nier qui peut êt­re la source de mau­vai­ses sur­pri­ses pour les per­son­nes qui doi­vent re­mett­re leur éta­blis­se­ment. Le re­gist­re du com­mer­ce su­is­se a en­re­gis­tré 2361 ra­dia­ti­ons d’établissements de re­stau­ra­ti­on ri­en que pour l’année 2019. Puisqu’il est aujourd’hui tou­jours plus com­pli­qué de re­trou­ver un suc­ces­seur adé­quat, la règ­le gé­né­ra­le n’est mal­heu­reu­se­ment plus la ven­te de l’établissement, mais plu­tôt sa fer­me­tu­re, et c’est là que ré­si­de tout le problème.

Si un in­dé­pen­dant gè­re son re­stau­rant dans ses pro­pres lo­caux, ceux-ci ap­par­ti­en­nent au­to­ma­ti­quement à la for­tu­ne com­mer­cia­le. Lors­que le re­stau­ra­teur ces­se son ac­ti­vi­té à son dé­part à la re­trai­te, la for­tu­ne com­mer­cia­le ne peut sub­sis­ter d’un point de vue fis­cal. Cel­le-ci est donc con­ver­tie en for­tu­ne pri­vée au mo­ment de la ces­sa­ti­on de com­mer­ce. Cet­te con­ver­si­on dé­clen­che en gé­né­ral au­to­ma­ti­quement des con­sé­quen­ces en ma­tiè­re fis­ca­le et d’assurances so­cia­les. 

Que se passe-t-il?

Le coût de la ces­sa­ti­on de com­mer­ce non dé­si­rée pour les fu­turs re­trai­tés dé­pend du cas d’espèce. Dans les gran­des li­gnes, les coûts sont cal­culés de la fa­çon suivante.

  • Si un in­dé­pen­dant vend le bien im­mo­bi­lier à son suc­ces­seur, le bé­né­fice de la ces­si­on, c’est-à-dire la dif­fé­rence ent­re la valeur dans la comp­ta­bi­li­té (valeur comp­ta­ble) et le prix de ven­te, est so­u­mis aux impôts et aux dé­duc­tions des assu­ran­ces so­cia­les. 
  • Mais si l’indépendant ces­se son ac­ti­vi­té et trans­fert son bien im­mo­bi­lier de la for­tu­ne com­mer­cia­le à sa for­tu­ne pri­vée, une aut­re ba­se d’imposition s’applique. Il faut alors pay­er des impôts et des dé­duc­tions des assu­ran­ces so­cia­les sur la dif­fé­rence ent­re la valeur comp­ta­ble et la valeur cou­ran­te. Cet­te valeur cou­ran­te con­sti­tue la valeur qu’il se­rait pos­si­ble d’obtenir en cas de ven­te potentielle.

L’imposition peut ain­si êt­re ex­trê­me­ment dif­fé­ren­te en fon­c­tion de l’estimation, alors qu’en au­cun cas il n’y a de re­venu supplémentaire.

In­for­mer et né­go­cier suf­fi­sam­ment tôt

Il est es­sentiel pour tout in­dé­pen­dant de se pen­cher suf­fi­sam­ment tôt sur les me­su­res et les con­sé­quen­ces fis­ca­les de son dé­part à la re­trai­te et de prend­re cont­act avec les au­to­ri­tés fis­ca­les. Nous re­com­man­dons de con­ve­nir avec ces der­niè­res la valeur à la­quel­le le bien im­mo­bi­lier se­ra trans­fé­ré de la for­tu­ne com­mer­cia­le à la for­tu­ne pri­vée. Lors de ces dis­cus­sions et né­go­cia­ti­ons, il est im­portant de don­ner à l’administration fis­ca­le des mo­tifs fac­tuels et vé­ri­fia­bles ex­pli­quant pour­quoi la valeur cou­ran­te dev­rait êt­re réduite.

Une ar­gu­men­ta­ti­on étayée

Voi­ci un ex­emp­le ti­ré de la pra­tique: le cli­ent avait pré­vu la ces­sa­ti­on de com­mer­ce et le trans­fert con­sé­cu­tif du bien im­mo­bi­lier com­mer­cial dans la for­tu­ne pri­vée. Les spé­cia­lis­tes de SBC Treu­hand SA ont alors re­çu le man­dat de fi­xer la valeur cou­ran­te et donc la ba­se dé­ter­mi­nan­te pour l’imposition. Ils ont par con­sé­quent fait éta­b­lir une ex­per­ti­se de la valeur cou­ran­te par des ex­perts in­dé­pen­dants. Mal­gré ce­la, l’administration fis­ca­le s’entêtait à vou­loir aug­men­ter la valeur de trans­fert sol­li­ci­tée de 800 000 CHF à 1 000 000 CHF. El­le in­vo­quait les dif­fé­ren­tes mé­tho­des de cal­cul em­ployées: en ef­fet, el­le-mê­me s’était ap­puyée sur la mé­tho­de com­pa­ra­ti­ve alors que SBC Treu­hand avait uti­li­sé la mé­tho­de de la valeur de ren­de­ment, qui ne pou­vait pas êt­re re­con­nue à ses yeux. La mé­tho­de com­pa­ra­ti­ve uti­li­se les prix de ces­si­on d’objets com­pa­ra­bles de la ré­gion con­cer­née com­me ba­se pour dé­ter­mi­ner le prix cou­rant du bien im­mo­bi­lier con­cer­né. 

Les spé­cia­lis­tes de SBC Treu­hand ont alors de­man­dé l’accès aux don­nées sur les ob­jets com­pa­ra­bles pris en comp­te et dé­ter­mi­né que l’administration fis­ca­le avait, dans ce cas, pris en comp­te un nombre in­suf­fi­sant d’objets com­pa­ra­bles et que le ré­sul­tat n’était donc ni re­pré­sen­ta­tif ni ad­mis­si­ble. Grâce à d’autres ar­gu­ments en ma­tiè­re de plan, de si­tua­ti­on, etc., et après une nou­vel­le ex­per­ti­se du bien im­mo­bi­lier, il a été pos­si­ble de fai­re ac­cep­ter à l’administration fis­ca­le la valeur sol­li­ci­tée en tant que valeur de trans­fert, soit une ré­duc­tion de l’imposition d’environ 33 000 CHF.